Sunday, November 13, 2011




Le quartier résidentiel très chic,
devenu une zone populaire

En plus de cent ans d'existence, Zeitoun s'est totalement transformé

Zeitoun, le quartier des oliviers, a perdu sa beauté d'antan et les champs plantés d'oliviers ne sont plus. Pourtant il s'en trouvent dans quelques jardins entourant des villas vétustes. Ce quartier est maintenant desservi par le métro du Caire.

par : Gérard Viaud
En plus de cent années d'existence, le quartier de Zeitoun au Caire s'est totalement transformé. De ce quartier résidentiel très chic, il est devenu une zone populaire dans laquelle subsistent toutefois quelques villas entourées de jardins qui attendent la pioche des démolisseurs afin de céder la place à des immeubles modernes. Vers la fin du XIXème siècle, une ligne de chemin de fer longeait des jardins et des champs vers le nord-est du Caire et côtoyait le désert. De temps à autre, des groupes de villas émergeaient au milieu de la verdure dans laquelle les oliviers dominaient. Ces villas étaient presque toutes occupées par de riches employés du gouvernement ou par des étrangers.

L'arbre de la sainte vierge a Zeitoun
étape de la sainte famille en Egypte

A Zeitoun, Yassa bey Ibrahim aménagea un vaste jardin compris entre les rues Sélim El-Aoual, Mansour, Toumambaï et Sennan. Son frère Khalil pacha Ibrahim construisit sur une partie de ce jardin une série de villas toutes de même forme, ainsi que l'église copte orthodoxe. En 1895, les Pères des Missions Africaines choisirent de créer une mission. Les Pères commencèrent par acheter une maison dont l'étage servait de résidence et le rez-de-chaussée de chapelle provisoire. Ils ouvrirent une école pour garçons le 17 septembre 1903 qui fut cédée aux Frères des Ecoles chrétiennes en 1912. Cette maison et celle école se trouvaient en bordure de l'actuelle rue Toumambaï.
Le 15 août 1922, ce fut à Zeitoun une fête à l'occasion de la bénédiction de la nouvelle église paroissiale de Zeitoun et la cérémonie fut présidée par Mgr Jules Girard. Cette église fut construite sur une partie du jardin appartenant à Yassa bey Ibrahim. Au mois de septembre 1896, les Sœurs de Notre-Dame des Apôtres fondèrent une Institution. Le 1er janvier 1907, une épidémie de diphtérie éclata à Zeitoun. Les annonces de morts se suivaient rapidement.
Le 6 janvier, les services sanitaires vinrent désinfecter la maison et les classes des écoles.



Olivier a Zeitoun

En 1914, l'Angleterre profita de l'alliance turco-germanique pour établir officiellement son protectorat sur l'Egypte. Le 20 décembre 1914, l'Egypte était devenue un sultanat, pour bien marquer son indépendance à l'égard du sultan de la Sublime Porte, avec Hussein 1er qui avait remplacé le Khédive Abbas II Helmi qui était à Constantinople depuis le 20 mai 1914 et que les Anglais empêchaient de revenir en Egypte. Le 19 décembre 1914, le Khédive avait été démis de ses fonctions par le gouvernement de Londres, mais il avait cherché à reprendre le pouvoir.
Les Anglais jugeaient Abbas II Helmi trop nationaliste et trop proche du gouvernement ottoman. En effet, il avait fait cause commune avec les ennemis de Sa Majesté britannique.
Durant les quatre années de guerre, l'Egypte connut une période de prospérité en raison de la présence des troupes alliées
Les autorités britanniques installèrent de vastes camps de soldats dans le désert entre le Caire, Héliopolis et Zeitoun et même jusqu'à Matarieh. De nombreux soldats étaient originaires de Nouvelle-Zélande, d'Australie, d'Irlande et d'Angleterre. Ces installations étaient devenues urgentes afin d'éviter une invasion de l'Egypte par les forces ottomanes alliées à l'Allemagne.
Au courant de l'année 1919, Zeitoun reçut deux visites importantes. Le 9 janvier, ce fut celle du cardinal Bourne, archevêque de Westminster, et le 21 novembre, le délégué du Saint Siège, Mgr Couturier.
Le soir du 8 décembre 1921 la pluie se mit à tomber pendant toute la nuit et le jour suivant, si bien que tout le quartier de Zeitoun fut inondé. Tout le monde se mit à évacuer l'eau à l'abri de parapluies, car il pleuvait comme dans la rue.
A Zeitoun, comme à peu près dans toute l'Egypte, les dégâts causés par ces pluies torrentielles furent considérables et d'innombrables maisons durent être réparées.
Le 20 mars 1928, le président du Syndicat des journalistes français et sous-directeur du Comité de propagande française à l'étranger, M. François Veuillot, donna une conférence à Zeitoun sur les activités féminines en France et il exalta le rôle de la jeune fille dans son foyer et dans la société. M. Veuillot enthousiasma son auditoire.
Selon la tradition copte, la Sainte Famille serait passée à Zeitoun et se serait arrêtée dans un champ planté d'oliviers où fut construit par la suite une petite église pour commémorer l'événement.
Par la suite, l'histoire de Zeitoun se serait arrêtée, pour se confondre avec celle de n'importe quel quartier du Grand-Caire, si un événement était survenu avec les apparitions de la Vierge Marie à l'église copte orthodoxe de Zeitoun en 1968.
En effet, à partir du 2 avril de cette année-là, les gens du quartier, Musulmans et Chrétiens, commencèrent à voir la Vierge apparaître au-dessus des coupoles de la petite église. Tout commença le 2 avril vers trois heures du matin quand les ouvriers d'un garage voisin de l'église aperçurent une femme marchant sur le rebord de la terrasse de l'église.
Les ouvriers commencèrent par interpeller cette femme pour la mettre en garde contre le danger qu'elle courait à marcher ainsi. Mais ils se rendirent compte que c'était une vision de lumière qui disparut au bout d'un certain temps. A partir de cette date, les foules se rassemblèrent chaque soir à Zeitoun pour apercevoir cette forme lumineuse et tous furent convaincus que c'était la Vierge. Ces apparitions furent confirmées par le patriarche copte orthodoxe Chenouda III et une fête fut instituée le 2 avril de chaque année pour commémorer le début de ces apparitions.
Une grande cathédrale a été construite non loin de la petite église et nombreux sont les pèlerins qui se rendent chaque année à Zeitoun.
Une charmante histoire est rattachée à Zeitoun. Sur le grand terrain de 3.000 mètres carrés que les Sœurs de Notre-Dame des Apôtres avaient acheté pour construire leur pensionnat, les Sœurs entretenaient une vache qui donnait son lait et permettait de faire tourner la saquieh pour arroser le jardin.
Mais, un beau jour, la vache donna naissance à un veau. Selon l'habitude française, le veau lui fut retiré. La vache se fâcha et ne donna plus son lait pendant au moins une année. Dans le jardin, du côté de la rue, il y avait une superbe treille qui donnait de beaux raisins. Un jour, les Sœurs trouvèrent sur la teille deux messieurs qui picoraient les raisins. Une d'elles se hasarda à leur demander s'ils trouvaient le raisin bon. Honteux et confus, ils quittèrent leur perchoir en disant: "Mille pardons, madame, mille pardons!".
A cette époque, la Compagnie des eaux ne fournissait pas encore la région de Zeitoun et chaque maison devait avoir sa saquieh mue par une vache. La Roussette des Sœurs remplissait ce pénible travail.
Un jour, Salem, un jeune homme de 18 ou 19 ans qui s'était attaché au service de la communauté, fouetta rudement Roussette qui, effrayée, tomba dans le puits de la saquieh. Salem se précipita à son secours et des hommes vinrent l'aider. Mais Roussette mourut pendant qu'elle était hissée hors de la saquieh. Toute la communauté accourut pour voir ce qui se passait. Deux religieuses françaises, de passage à Zeitoun, témoin de l'accident furent toutes bouleversées.
Une voisine, Mme Gripon, en entendant tout ce bruit autour de la saquieh, accourut à son tour et elle se trouva devant le cadavre de la vache qu'elle avait vendue aux Sœurs. Elle se mit à pleurer en disant au milieu de ses larmes: "Roussette, ma Roussette, ma fille, ma pauvre fille!".
Pour la communauté, ce fut une grande perte qui fut suivie de plusieurs autres. En effet, les roues de la saquieh brisèrent les jambes d'une nouvelle vache et plusieurs autres périrent épuisées par un travail trop pénible. Heureusement, en 1899, la Compagnie des eaux s'installa à Zeitoun et mit fin, par le fait même à ces pertes de vaches et à ces soucis.

No comments: